Il s'élève de la place une douce rumeur mêlée aux sons de la vie d'un village : le bruit pétaradant d'une mobylette, le bêlement d'un mouton qu'un homme tire au bout d'une longe, le hennissement d'un cheval brinqueballé à l'arrière d'une camionnette, le glin glin de la sonnette d'un vélo pour avertir un piéton imprudent, le cri d'un écolier interpelant un copain...
En ce mardi matin, jour du marché, la chaleur se fait déjà un peu pesante; pourtant il n'est que 10H et nous sommes en mars .Le soleil aujourd'hui brille dans un ciel bleu , couleurs de cartes postales ....
Le chauffeur de taxi* doit venir me rechercher dans deux heures , deux heures pour découvrir un peu de la vie de ce village à quelques kilometres de de Midoun.
J'embrasse du regard la petite place qui ruisselle de soleil , là se tient le marché aux légumes . La lumiere caresse une antique balance posée sur un vieux "cageot" . Ce mot existe t-il encore d'ailleurs , un cageot ...cela me fait revenir quelques décennies en arrière lorsqu'en provence on utilisait ce type de cagettes en bois bien ventrues, on en voit encore dans les vieux films mais ils ont laissé la place aux cagettes plus pratique à entasser en bois blanc , en plastique ou en simple carton ...ce seuil mot de "cageot" m'a ramené des années en arriere, et avec lui les parfums oubliés qui viennent chatouiller mes narines ...
car ici tout s'est figé dans cet autrefois . Je ne peux m'empecher de respirer à pleins poumons tous ces flagrances d'antan , je ferme les yeux et je retrouve tout cela ...c'est bien vrai là mémoire olfactive est une des rares memoire qui ne disparait pas , et ramène à votre esprit une multitude de souvenirs que l'on pensait oublié ...je retrouve l'odeur sucrée des tomates , celui frais des fenouils ...
Un coup d'oeil à ma montre me fait comprendre que si je veux avoir quelques chances de voir le marché aux poissons je dois m'enfoncer dans les ruelles ...un vendeur de bijoux m'interpelle .
"Combien tu penses que je vends mes bijoux " me dit il d'une voix douceureuse ...bien m'en prend de ne pas donner un prix car ce même bracelet semble t'il que j'ai acheté 8 euros à Midoun il me le propose 1 euro ! pas le temps de mieux regarder , je repasserai en revenant du marché aux poissons sauf que de ruelle en ruelle, je ne penserai plus à repasser par l'étal de bijoux !
Je déambule dans les venelles du village , au hasard, lorsque je croise 3 adorables gamins d'une dizaine d'année .C'est eux qui gentiment m'accompagneront à la porte du marché au poisson en m'assurant que même s'il n'y a que des hommes à l'interieur qui font leurs achats je peux entrer sans problème .
Je monte une volée de marches , passe une grille et me retrouve dans cette partie des bâtisses du maghreb , hall qui ouvre sur la cours des maisons , des patios où la d'une petite place inondée de soleil . En son centre une sorte de rotonde rappelant cette construction que l'on trouve au centre des jardins des mosquées et dont je ne connais pas le nom .
Je fais un rapide tour du lieu , j'hésite , je n'aime pas photographier des personnes sans leur autorisation et là il est difficile de ne pas prendre les badauds qui me regardent un peu intrigués ...aimablement un homme âgé en tenue traditionnelle s'approche de moi et m'invite à prendre les clichés que je souhaite. D'un sourire je le remercie et j'essaye de m'imprégner de l'ambiance pour choisir mes prises de vue .
Un petit oiseau , en équilibre sur le bord du mur tente de se faire remarquer en sifflant ses plus beaux morceaux .
Il règne dans ce lieu une fraicheur agréable .Pour voir toute la richesse des poissons de la région j'aurais dû venir plus tôt . Je ronchonne un peu dans mon for intérieur (pas le temps de voir l'orthographe! je chercherai dans le dico plus tard ...mais là je suis au milieu des parfums de la mer et je risque de perdre quelques émotions du moment!!!) après le chauffeur "du jour"*qui m'a déposé au village.
Le port de Aghir n'est pas très loin et probablement les poissons viennent de ce joli petit coin où quelques bateau de pêcheurs sont au mouillage , des barques comme nos pointus des côtes provençales
Les rayons du soleil jouent avec la couleur acier des écailles des poissons dont la mer méditerranée a su être prolixe
des sars ,des rougets ...
Le pêcheur vêtu de sa gandoura ocre rassemble d'un mouvement de main les quelques petits poissons qui restent devant lui , les fais glisser dans un sachet plastique puis d'une main experte les tient en équilibre au bout de sa balance
Les poissons vendus , la petite place , se vide ... mes trois petits guides m'attendent devant la grille . Je glisse dans la main de chacun, sans qu'ils se fassent prier(!) une pièce de 1 dinar , 53 centimes d'euro , qu'ils s'empresseront d'aller dépenser en friandises ...un bien petit trésor que je leur offre volontiers pour leur serviabilité .
*Je ne vous donnerai pas le nom de ce chauffeur car je n'ai pas apprécié sa façon de faire : il n'a pas été bien honnête , prétendant me faire payer un forfait alors qu'il me fera payer ni au kilometre au compteur, ni au forfait , mais au temps passé ... alors que nous avons dû même , faire une halte au poste à essence (j'en ai profité pour voir que le gas oil est moitié prix par rapport à la France , donc très cher pour un salaire qui correspond à environ 3 ou 4 euros par jour ) ; chauffeur donc qui ne dépassera guère le 30 km/h , voudra absolument me faire passer par des chemins que je connaissais déjà , me proposera de faire des photos de coins que tout le monde a probablement déjà mis en ligne sur le web ! on ne m'y prendra plus ! Comme je regrette de ne pas avoir retrouvé un "karim " pour me faire visiter ! mais je ne désespère pas de rentrer en France dans une semaine avec quelques bonnes adresses!